How to save a life w/ James (PV)

Quand tu vis dans la rue, chaque jour est un combat et tu sais très vite si tu vas le gagner ou si tu seras KO en fin de journée. J'explique. En me réveillant aujourd'hui, j'ai su que j'allais passer une journée plus que merdique car je n'avais pas mangé depuis deux jours. Je partais donc avec un lourd handicap. Miwa lui, il avait la pêche et le ventre bien rempli. Je défie quiconque de dire que mon chien est négligé ! Toujours est-il que, je meure de faim et en plus il fait froid. Je ne vais pas retourner chez Merlin et encore moins, chez Jules, je leur ai suffisamment envahi le quotidien. Je vais aller faire un tour du côté des associations, histoire de prendre une douche et de me changer. Je ne vais pas refuser un petit café non-plus. Ainsi, bien entouré dans ma couverture de fortune, je traverse la ville, Miwa sur les talons. Il y a bien longtemps que les gens ne me regardent plus ici mais, ce n'est pas grave. J'arrive à destination et pousse la porte, il n'y a que deux-trois personnes. Omega, bienvenue. Comment vas-tu aujourd'hui ? Je retire ma couverture et mon pull avant de lui répondre : Je vais bien mais le froid m'indispose un peu ce matin... Pas qu'un peu mais je ne veux pas qu'on me plaigne. Oui c'est vrai, il fait froid. Tu trouveras tout ce dont tu as besoin aux casiers, je ne te fais pas visiter, tu connais la maison. J'acquiesce et me dirige vers mon casier attitré. Cette boîte et la seule chose qui m'appartient vraiment. Il y a des souvenirs, des vêtements et quelques produits pour avoir un minimum d'hygiène malgré tout. Je récupère ce dont j'ai besoin et referme le cadenas codé, puis me dirige vers les douches. Par chance, il n'y a personne et je peux donc en profiter aussi pour laver Miwa. Ce chien, c'est toute ma vie. Il est mon frère, mon meilleur ami, mon ange gardien. Oui, Miwa est tout pour moi. Je branche la douche qui ne met pas bien longtemps à chauffer, et me glisse en dessous. Je me lave rapidement puis m'agenouille pour passer au lavage de Miwa. Tu vas être tout beau et tout propre. Après on ira chercher un peu de manger. Ce chien est merveilleux parce qu'il est sage et il apprécie quand on est sous la douche. Ouais, j'ai vraiment le meilleur des chiens.

Après de longues minutes, je me sèche enfin puis m’occupe de Miwa en chantonnant. Je chante rarement parce que de toute façon, à quoi cela pourrait bien me servir ? Bref. Je pose la serviette au sol, laissant Miwa s’y frotter dessus pendant que je m’habille. Bon, les fringues sont trop grandes mais au moins, elles sont chaudes. Miwa on va manger un morceau ! Je vérifie qu’il est bien sec, je ne voudrais pas qu’il tombe malade. Retournant à mon casier, j’y dépose mes quelques affaires et prends mon porte-monnaie qui est bien vide. Je dois avoir trois dollars maximum, juste assez pour acheter un café et un cookie. Je soupire tristement puis regarde Miwa qui remue la queue, ne sachant probablement pas pourquoi je suis si triste. Je lui souris et m’agenouille à ses côtés pour le prendre dans mes bras, lui chuchotant que tout va bien. Je retourne à l’entrée et remercie la dame de service avant de quitter l’association. On va aller chercher de quoi manger et on va bouger un peu mon Miwa. Je passe rapidement par la boulangerie puis pars en vadrouille un peu partout en ville. Si j’avais un appareil photographique, je prendrais des tonnes de photos.

Les heures sont passées et la journée est terminée. Je me sens faible et j’ai de plus en plus froid, sans parler de mon estomac qui crie famine depuis bien des heures. Je crois que j’ai puisé dans mes réserves journalières. Je ne sais même pas l’heure qu’il est mais, il est très tard. Je m’engage dans une ruelle que je connais bien, il y a un tuyau climatique qui relâche de l’air chaud, je pense que je vais me mettre ici pour la nuit. Je m’installe donc, ou plutôt, je me laisse tomber devant la sortie de l’air chaud et ferme les yeux. J’ai la tête qui tourne de plus en plus mais au moins, je suis un peu au chaud, n’est-ce pas ?

Est-ce que je suis mort ? Je ne ressens plus rien. Ni le froid, ni la faim, ni même la présence de Miwa. Mon esprit divague au gré du vent, au gré du temps qui semble s’être figé, comme prisonnier de la glace. Il y a des ombres. Il y a des rires. Il y a le silence qui suit comme engourdi par un hiver glacial. Où suis-je en fait ? D’aussi loin que je m’en souvienne, je ne suis jamais venu ici. J’ai vu des tas de paysages durant mon parcours chaotique mais, celui-ci, m’est totalement inconnu. Est-ce une espèce d’enfer qui m’est réservé quand je passerais l’arme à gauche ? Remarque, il est peut-être déjà trop tard pour moi. Peut-être que je suis déjà mort. Et puis il y a cette femme qui s’approche avec un sourire angélique et pose une de ses mains sur ma joue. Je peux lire sur ses lèvres. Il me parle de mon enfance je crois et elle s’excuse avant de fondre en larmes. Je n’entends plus aucun son, comme si j’étais sourd. Elle s’approche de moi et dépose un baiser sur mon front avant de me sourire, puis elle me gifle sans raison. Je suis aspiré dans le monde réel et lorsque j’ouvre les yeux, je tombe sur James le barman. Il est charmant et il a toujours été sympa avec moi. A côté de lui, il y a mon Miwa qui pleure. J’étais mort ? Je grimace un peu et redresse la tête. Je… pardon je n’devrais pas être là, c’est ça… ? Je suis désolé… J’essaye de me lever mais mes jambes ne supportent vraiment plus mon poids et je tombe au sol, entraînant James dans ma chute, le faisant se retrouver entre mes jambes. Je rougis fortement : Je… pardon ! Je suis désolé… Mes yeux plongent dans les siens et je trouve la situation bizarrement agréable. Mais il faut que je me reprenne. C’est Miwa qui t’a appelé… ? Mais c’est bien sûr ! Il est allé à une cabine téléphonique et a appelé le bar en disant : Wesh gros, mon daron il est HS par terre dans une rue pas loin, tu peux venir le secouer, please ? Je crois que mon cerveau a gelé. Vraiment… je m’excuse pour le dérangement… Je peine à garder les yeux ouverts tant le froid et la fatigue, pompent mon énergie. Je vais bien… tu peux retourner… retourner euh… J’ai du mal à me souvenir de ce qu’il pourrait bien faire à une heure si tardive. Je grelotte vivement et le bout de mes doigts vient effleurer sa joue sans que je ne sache pourquoi. Il est si chaud, et moi si gelé… D’habitude, je ne suis pas si familier avec quelqu’un mais là, je pense que mon état y est pour beaucoup. Je ne veux pas… déranger… je vais aller ailleurs… je… Je quoi ? Je n’en sais rien du tout. Je ne suis plus vraiment là et mes yeux se referment. Je vais… rester un peu… et… et je pars après…

Bon sang, il va ouvrir les yeux oui ? J’en ai marre de lui foutre des claques ! J’espère qu’il n’est pas dans le coma ou une connerie du genre… On ne sait jamais réellement ce qu’il se passe entre les gens qui vivent à la rue, et ça ne me rassure pas tellement. En fait, l’idée même qu’on ait pu lui faire du mal me donne envie de… Okey non, il ne faut pas que je pense à cela, et que je me revoie une arme à la main. Ce n’est pas bon pour moi. Ce n’est bon pour personne. Cette partie de ma vie est bien loin derrière moi et il est hors de question que cela revienne sous prétexte que je ne garde jamais mon calme bien longtemps ! Je soupire un moment et finalement, Omega ouvre les yeux. Putain. Je crois bien que je soupire de soulagement et je suis à deux doigts de dire merci à Dieu, mais je n’en n’ai pas le temps parce qu’il prend la parole et s’excuse de je ne sais quoi, comme quoi il ne devrait pas être là et je capte même pas ce qu’il raconte au juste. « C’est rien, cool. » Dis-je en affichant un petit sourire alors qu’il tente de se redresser en prenant appui sur moi, mais il est bien trop faible et rechute, m’entraînant avec lui. Je me retrouve entre ses jambes, et putain, il ne faut pas que des images me traversent l’esprit maintenant. Pas de flingues. Pas de sexe. Esprit, reste à ta place.

« D’une certaine manière, ouais… » Il faut dire que j’ai eu du mal à comprendre ce que me voulait ce chien, mais je suis bien content d’avoir suivi mon instinct en venant ici. « C’est ça, tu vas bien… Et moi j’suis la reine d’Angleterre en plus sexy. » Dis-je en lui adressant un clin d’œil. Je ne sais même pas pourquoi je dis autant de la merde. Il me trouble un peu ce mec. C’est étrange. Mais il ne faut pas que je m’attarde là-dessus maintenant : il y a mieux à faire. « Mec, j’te laisserai pas dans un état pareil… Eh ? Putain, il recommence ! » Ouais, il ferme les yeux et je me doute bien qu’il sombre de nouveau dans l’inconscience. Bon, aux grands maux, les grandes remèdes ! Je chope ses affaires, et quelques secondes plus tard, je le soulève et traverse la ruelle pour rejoindre le bar quelques mètres plus loin, le chien sur les talons. J’entre par la porte de service et mon patron me tombe dessus. « Putain James, c’est quoi ce merdier ?! » Me hurle-t-il presque de la porte de la réserve. « C’est une situation d’urgence boss, j’te jure ! » Dis-je en haussant les épaules. J’ai toujours ce ton désinvolte, en mode je m’en branle qu’il hurle. « J’allais pas le laisser crever dans la rue ! J’peux prendre ma soirée ? J’lui donne juste un truc à bouffer ici et j’me tire ça t’va ? » Lui demandé-je en plantant mon regard dans le sien. « Vas-y. Emmène le dans la salle à l’arrière, je te ramène un truc chaud. » Il marmonne dans sa barbe avant de disparaître. Il est bourru mais fichtrement sympa ce con.

Alors comme prévu, j’emmène Oméga jusqu’à la salle à l’arrière où on fout nos affaires et rapidement, je le pose doucement au sol. Je reste à ses côtés et lui frappe un peu la joue, encore, mille excuses, je me ferai pardonner. « Omega ? Réveille-toi. » Dis-je alors que le chien s’assoit à côté en pleurant. « Y a ton chien qui va m’bouffer si tu te réveille pas là. » Ajouté-je en tentant encore de faire de l’humour. Drôle je suis. « C’est quoi ce clébard ? » Demande mon boss en arrivant avec une tasse fumante. Il la pose sur une table et me regarde. « Bah un clébard. » Je lui adresse mon plus beau sourire et de nouveau, il s’éloigne en marmonnant. J’l’aime bien ce con. Mais bref, je me concentre de nouveau sur Omega qui semble revenir à lui.

Je crois que je suis reparti dans ce pays bizarre dans lequel je me trouvais avant que cette femme qui ne me rappelle rien, me frappe et me renvoie sur terre, dans la triste réalité. J’ai vaguement entendu James me parler de la Reine d’Angleterre qui était sexy. Bordel man, depuis quand ce pâté en croûte est sexy ? James est peut-être fan des Cougars, qui sait. Le paysage est différent cette fois-ci. Il y a de la glace partout et pourtant, je ne sens toujours pas le froid alors que le vent rage tout ce qu’il sait. Je suis sensé faire quoi maintenant ? Est-ce que je dois marcher dans la neige tout droit devant moi dans l’espoir de trouver une chaumière ? Ou est-ce que je dois rester ici sans bouger ? Un tintement de clochettes se fait entendre. Non mais sérieux ? Et là le Père Noël va débarquer c’est ça ? Bordel, je n’ai pourtant rien pris d’illicite quoi. Je ne fume que des cigarettes et je ne me drogue pas. Une masse se profile à l’horizon et vous savez quoi ? C’est le Père Noël, putain ! J’ai le Père Noël dans ma tête, le truc de fou ! Il me tend une foutue clochette les gars ! Il veut que j’en fasse quoi ? Que je la mette dans mon … euh ouais non on va éviter, je n’ai pas de lubrifiant. Néanmoins je prends son cadeau alors qu’il m’invite à m’installer dans son traineau. Il sort un « Here we go ! » avant d’agiter les rênes pour faire bouger ses animaux. Super, je vole dans le ciel avec le Père Noël, tout va bien.

J’ouvre lentement les yeux pour tomber une fois de plus dans ceux de James. Je me redresse lentement et à peine suis-je assis que Miwa se jette sur moi pour m’embrasser en couinant. Okay, j’ai dû rater le train… ; dis-je dans une voix éteinte. Je caresse Miwa tendrement alors qu’il se couche presque sur moi. Je regarde James et me sens rougir : …vraiment, je suis désolé… j’ai un peu honte… Je baisse les yeux et continue de caresser mon chien doucement, un peu de manière absente. J’ai vu le Père Noël… il m’a offert une foutue clochette… je n’ai rien pris pourtant… Miwa s’ébroue vivement et un tintement de clochette vient se glisser dans mes oreilles. …ah j’ai compris le délire… en fait le Père Noël c’était toi et Miwa, la clochette… bon sang… J’ai de plus en plus honte de la situation. Je viens de dire à James qu’il était le Père Noël, je crois qu’on ne peut pas faire pire, si ? Je soupire longuement et passe une main tremblante dans mes cheveux. Il faut que je parte… je t’ai assez ennuyé comme ça… merci encore pour ton aide James… Mon estomac se révolte bruyamment, me faisant rougir davantage si c’est possible. Ouais, je meurs de faim mais je n’ai pas les moyens de me payer la moindre chose.